Karl Marx jeune, auteur de La question juive, livre disponible à cette adresse : https://www.marxists.org/francais/marx/works/1843/00/km18430001a.htm
La laïcité est étrangement redevenue l'objet d'un débat virulent dans la politique française : on pouvait croire celui-ci définitivement réglé, la laïcité n'étant semblait-il plus menacée que par quelques versaillais anachroniques. Mais il n'aura échappé à personne que la laïcité fait de nouveau l'objet d'une polémique, avec l'irruption de nouveaux contingents de croyants bien plus pratiquants, qui ne sont plus catholiques mais musulmans, et ce dans le contexte du développement d'une idéologie qui se définit par le refus de la laïcité, l'islamisme.
À l'extrême-droite, c'est la réponse habituelle : tout ce qui diffère de son fantasme du Français idéal doit disparaître, et le même Front National si prompt à rejeter la laïcité quand il s'agit de favoriser le catholicisme s'en revendique quand il s'agit d'exclure les musulmans -« La laïcité, c'est quand l'État distingue entre les religions », c'est du Marine le Pen dans le texte ! À gauche, par contre, on assiste à une certaine perdition : il y a la dérive de ceux qui proclament qu'après tout, les musulmans sont une minorité particulièrement discriminée, ce qui est vrai, et que par conséquent, la laïcité risque de devenir une arme pour les exclure, ce qui est faux. La laïcité ne peut pas exclure de gens, par définition. Et il y a la dérive inverse, celle de ceux à gauche qui croient que « La laïcité, c'est quand la religion reste dans la sphère privée », et qui défendent l'interdiction totale des signes religieux dans l'espace public : là encore, c'est faux. La définition de la laïcité, telle que l'a définie la loi de 1905, c'est la neutralité religieuse de l'État, pas de l'espace public ! C'est à dire que l'État et ses agents n'ont pas à reconnaître ou à financer une religion, ils sont neutres ; et s'ils sont neutres, c'est justement pour que la religion puisse être affichée dans l'espace public, pour que personne n'ait à dissimuler sa religion sous peine d'être exclu par l'État, qu'il soit catholique, athée, protestant... ou musulman, donc.
Mais il y a plus grave. Car la racine de ces deux erreurs, c'est une incompréhension de la religion et de pourquoi la gauche est laïque depuis toujours, qui conduit à ne pas comprendre ce qu'est notre laïcité.
Les discussions en ligne sont particulièrement utiles pour comprendre le problème : qui n'a jamais vu un quelconque propagandiste d'extrême-droite retranscrire un verset particulièrement violent du Coran, a priori incompatible avec les idées de la gauche, pour se justifier ? Souvent en rajoutant la célèbre citation malhonnêtement tronquée de Karl Marx « la religion est l'opium du peuple » ? Certains à gauche ne savent pas comment répondre face à cela, ils ne savent pas comment défendre la véritable laïcité, celle qui n'exclut pas.
Bien sûr, une première réponse que l'on peut faire, c'est tout simplement que les citations en question sont généralement sorties de leur contexte, tronquées et surtout sans aucune culture théologique alors que l'interprétation de textes religieux anciens est un exercice difficile : c'est tout à fait vrai, croire que les textes peuvent être compris littéralement, sans aucune culture ni réflexion, est une lecture typiquement salafiste de l'islam, reprise par les islamistes, en plus d'être invalidée par le Coran lui-même ; autrement dit, ceux qui s'en prévalent donnent raison aux islamistes sans le savoir ! Si l'on s'en tient à une lecture littérale, le Coran apparaît de plus comme un texte contradictoire, qui prône ici la tolérance et là l'intolérance, de sorte que ceux qui en font une « idéologie violente » sont ignorants ou de mauvaise foi. Mais en fait, ce n'est même pas ça, le vrai problème.
Le problème, c'est que les gens qui essaient de justifier leur intolérance envers les croyants d'une religion par ses textes font comme si le comportement des êtres humains était régi par des textes religieux ! Quelle conception imbécile de la nature humaine est-ce là ? Est-ce que quelqu'un croit sérieusement que tous ceux qui se revendiquent comme musulmans ont lu attentivement le Coran et que chacun de leurs actes s'explique d'abord par la volonté de l'appliquer ? Et à supposer que ce soit le cas, que la façon dont ils comprennent le Coran n'est pas influencée par leur contexte social et culturel ? Et les catholiques, croit-on qu'ils font réellement dans leur vie tout ce que commande leur Église, même les plus pieux d'entre eux ?
Suivant cette amusante théorie, le croyant d'une religion est en fait séparé du reste du monde, en suspension dans les airs : il n'a rien appris à l'école, il n'a rien lu d'autre dans sa vie que des textes religieux, il n'a pas d'opinions politiques, il ne regarde pas la télé, et surtout, il n'essaie pas de vivre alors que l'économie et la structure sociale devraient lui imposer un comportement pour cela... Il ne vit que pour appliquer les textes religieux ! Vous remarquerez que ceux qui propagent cette idée ne l'appliquent surtout pas à eux-mêmes, ni à ceux qui ne sont pas les croyants de la religion qu'ils attaquent, ceux-ci forment un groupe à part de l'humanité qui n'a pas de raison, juste des textes religieux : c'est qu'en fait, cette conception est tout simplement raciste.
Remettons donc les choses à leur place : la religion est une croyance à laquelle adhèrent les individus, mais ce n'est qu'un élément particulier de leur vie et de leur société, ils sont avant tout pris dans un contexte culturel, économique et social qui détermine leurs actions, et qui détermine aussi l'interprétation qu'ils ont de leur religion ! La preuve en est facile à apporter : on ne comprend et ne pratique plus du tout le christianisme comme on le faisait au XVIème siècle en pleines guerres de religion, et un imbécile à cette époque aurait pu s'amuser à piocher des citations violentes de l'Ancien Testament (car il y en a !) pour dire que le christianisme est intrinsèquement violent ; mieux, les démographes Emmanuel Todd et Youssef Courbage montrent dans leur ouvrage Le rendez-vous des civilisations que l'islam n'est pas du tout pratiqué de la même manière en Indonésie, en Arabie Saoudite, au Maghreb ou dans l'ex-Union Soviétique, la place des femmes et la natalité sont très différents entre ces pays, parce que les contextes sociaux, économiques, culturels, historiques, ne sont pas les mêmes. Mieux : ces pays évoluent dans leurs structures familiales pour se rapprocher du modèle occidental, c'est précisément pour contrer cette évolution que les islamistes déchaînent leur violence !
Et cela nous renvoie droit à une leçon que le socialisme n'aurait jamais dû oublier : celle du marxisme. Car la pensée de Marx lorsqu'il écrivait que « la religion est l'opium du peuple » n'était pas celle de l'interdiction de quelque religion que ce soit : pour lui, la religion était avant tout une superstructure née du mode de production, c'est l'organisation économique et sociale qui la détermine. L' « opium du peuple » n'est que ce qui masque l'oppression pour aider les opprimés à la supporter.
Cette pensée matérialiste, il la développe en particulier dans un livre qu'on n'a cessé depuis de déformer : La question juive. Dans cet ouvrage, il répond à son ancien professeur Bruno Bauer, lequel estimait l'émancipation des juifs impossible si ceux-ci ne renonçaient pas à leur religion, le judaïsme étant pour Bauer un blocage supplémentaire à la liberté par rapport au christianisme : on était alors dans l'Allemagne du XIXème siècle, où les Juifs vivaient séparés du reste de la société, avec des libertés spécifiques en matière de commerce et de finance mais un statut inférieur aux chrétiens, dans un État qui n'était pas laïque. La réponse de Marx est cinglante : elle l'amène d'une part à théoriser la laïcité, considérant qu'un véritable État ne peut être lié à une religion en particulier et que sa véritable tâche est justement de permettre l'émancipation politique sans que l'émancipation religieuse ne soit nécessaire, mais surtout, il reproche à son ancien professeur de ne chercher à voir dans l'émancipation des juifs qu'une question théologique, séparée de toute pratique, comme si le comportement des juifs s'expliquait par leurs textes religieux et non par leurs conditions de vie. D'où son appel : « Considérons le Juif réel, non pas le Juif du sabbat, comme Bauer le fait, mais le Juif de tous les jours. Ne cherchons pas le secret du Juif dans sa religion, mais cherchons le secret de la religion dans le Juif réel. ». Ce qui amène Marx à conclure que dans la société où ils vivent, qui les voue aux activités de finance et de commerce, les juifs ne peuvent pas abandonner leur religion, plus souple que le christianisme pour ces activités : ils en ont un besoin pratique. Et par conséquent, que si la société changeait, ne leur assignait plus ces activités, les juifs renonceraient à leurs croyances, devenues inutiles. C'est donc la société qu'il faut changer pour émanciper les juifs, il clôt alors son ouvrage sur la phrase : « L'émancipation sociale du Juif, c'est l'émancipation de la société du judaïsme. », c'est à dire que pour réellement émanciper les gens de la religion, il faut les émanciper de la société qui a produit cette religion.
Vouloir interdire une religion, ou simplement sa manifestation publique, est donc parfaitement inutile : on peut considérer une religion, qu'il s'agisse de l'islam, du christianisme, du judaïsme ou d'une autre, comme une aliénation, comme quelque chose de violent et ainsi de suite, mais le comportement des individus étant déterminé avant tout par leur société, y compris en ce qui concerne leur religion, c'est cette société qu'il faut changer.
On n'est pas obligé de partager l'athéisme et le matérialisme qui étaient ceux de Marx, mais toujours est-il qu'il met l'accent sur quelque chose de capital (sans mauvais jeu de mots) : la clé du comportement humain ne réside pas dans des textes religieux mais dans une société réelle, c'est avant tout cela qui détermine les actions et les idées des croyants comme des autres ; sinon, on peut se demander pourquoi on n'a plus vu un juif lapider quelqu'un depuis un bon moment... Ce n'est pas seulement parce que le message de ces religions est bien plus complexe que ne le croient les extrémistes de tout bord mais aussi, tout simplement, parce que les croyants n'utilisent pas la religion comme un logiciel mais avec une raison et dans un contexte social.
Voilà pourquoi le socialisme revendique la laïcité, voilà pourquoi la religion est une affaire privée qui peut s'exprimer publiquement : le pouvoir politique n'a pas à s'occuper de ce que les gens croient mais de ce qu'ils font, et ce qu'ils font n'est pas déterminé par un texte vieux de quinze siècles mais par une structure sociale.
La réponse aux conflits qui peuvent survenir avec des croyants aux revendications agressives, musulmans ou autres, comme aux intolérants est donc la même : la laïcité, toute la laïcité, rien que la laïcité.
À l'extrême-droite, c'est la réponse habituelle : tout ce qui diffère de son fantasme du Français idéal doit disparaître, et le même Front National si prompt à rejeter la laïcité quand il s'agit de favoriser le catholicisme s'en revendique quand il s'agit d'exclure les musulmans -« La laïcité, c'est quand l'État distingue entre les religions », c'est du Marine le Pen dans le texte ! À gauche, par contre, on assiste à une certaine perdition : il y a la dérive de ceux qui proclament qu'après tout, les musulmans sont une minorité particulièrement discriminée, ce qui est vrai, et que par conséquent, la laïcité risque de devenir une arme pour les exclure, ce qui est faux. La laïcité ne peut pas exclure de gens, par définition. Et il y a la dérive inverse, celle de ceux à gauche qui croient que « La laïcité, c'est quand la religion reste dans la sphère privée », et qui défendent l'interdiction totale des signes religieux dans l'espace public : là encore, c'est faux. La définition de la laïcité, telle que l'a définie la loi de 1905, c'est la neutralité religieuse de l'État, pas de l'espace public ! C'est à dire que l'État et ses agents n'ont pas à reconnaître ou à financer une religion, ils sont neutres ; et s'ils sont neutres, c'est justement pour que la religion puisse être affichée dans l'espace public, pour que personne n'ait à dissimuler sa religion sous peine d'être exclu par l'État, qu'il soit catholique, athée, protestant... ou musulman, donc.
Mais il y a plus grave. Car la racine de ces deux erreurs, c'est une incompréhension de la religion et de pourquoi la gauche est laïque depuis toujours, qui conduit à ne pas comprendre ce qu'est notre laïcité.
Les discussions en ligne sont particulièrement utiles pour comprendre le problème : qui n'a jamais vu un quelconque propagandiste d'extrême-droite retranscrire un verset particulièrement violent du Coran, a priori incompatible avec les idées de la gauche, pour se justifier ? Souvent en rajoutant la célèbre citation malhonnêtement tronquée de Karl Marx « la religion est l'opium du peuple » ? Certains à gauche ne savent pas comment répondre face à cela, ils ne savent pas comment défendre la véritable laïcité, celle qui n'exclut pas.
Bien sûr, une première réponse que l'on peut faire, c'est tout simplement que les citations en question sont généralement sorties de leur contexte, tronquées et surtout sans aucune culture théologique alors que l'interprétation de textes religieux anciens est un exercice difficile : c'est tout à fait vrai, croire que les textes peuvent être compris littéralement, sans aucune culture ni réflexion, est une lecture typiquement salafiste de l'islam, reprise par les islamistes, en plus d'être invalidée par le Coran lui-même ; autrement dit, ceux qui s'en prévalent donnent raison aux islamistes sans le savoir ! Si l'on s'en tient à une lecture littérale, le Coran apparaît de plus comme un texte contradictoire, qui prône ici la tolérance et là l'intolérance, de sorte que ceux qui en font une « idéologie violente » sont ignorants ou de mauvaise foi. Mais en fait, ce n'est même pas ça, le vrai problème.
Le problème, c'est que les gens qui essaient de justifier leur intolérance envers les croyants d'une religion par ses textes font comme si le comportement des êtres humains était régi par des textes religieux ! Quelle conception imbécile de la nature humaine est-ce là ? Est-ce que quelqu'un croit sérieusement que tous ceux qui se revendiquent comme musulmans ont lu attentivement le Coran et que chacun de leurs actes s'explique d'abord par la volonté de l'appliquer ? Et à supposer que ce soit le cas, que la façon dont ils comprennent le Coran n'est pas influencée par leur contexte social et culturel ? Et les catholiques, croit-on qu'ils font réellement dans leur vie tout ce que commande leur Église, même les plus pieux d'entre eux ?
Suivant cette amusante théorie, le croyant d'une religion est en fait séparé du reste du monde, en suspension dans les airs : il n'a rien appris à l'école, il n'a rien lu d'autre dans sa vie que des textes religieux, il n'a pas d'opinions politiques, il ne regarde pas la télé, et surtout, il n'essaie pas de vivre alors que l'économie et la structure sociale devraient lui imposer un comportement pour cela... Il ne vit que pour appliquer les textes religieux ! Vous remarquerez que ceux qui propagent cette idée ne l'appliquent surtout pas à eux-mêmes, ni à ceux qui ne sont pas les croyants de la religion qu'ils attaquent, ceux-ci forment un groupe à part de l'humanité qui n'a pas de raison, juste des textes religieux : c'est qu'en fait, cette conception est tout simplement raciste.
Remettons donc les choses à leur place : la religion est une croyance à laquelle adhèrent les individus, mais ce n'est qu'un élément particulier de leur vie et de leur société, ils sont avant tout pris dans un contexte culturel, économique et social qui détermine leurs actions, et qui détermine aussi l'interprétation qu'ils ont de leur religion ! La preuve en est facile à apporter : on ne comprend et ne pratique plus du tout le christianisme comme on le faisait au XVIème siècle en pleines guerres de religion, et un imbécile à cette époque aurait pu s'amuser à piocher des citations violentes de l'Ancien Testament (car il y en a !) pour dire que le christianisme est intrinsèquement violent ; mieux, les démographes Emmanuel Todd et Youssef Courbage montrent dans leur ouvrage Le rendez-vous des civilisations que l'islam n'est pas du tout pratiqué de la même manière en Indonésie, en Arabie Saoudite, au Maghreb ou dans l'ex-Union Soviétique, la place des femmes et la natalité sont très différents entre ces pays, parce que les contextes sociaux, économiques, culturels, historiques, ne sont pas les mêmes. Mieux : ces pays évoluent dans leurs structures familiales pour se rapprocher du modèle occidental, c'est précisément pour contrer cette évolution que les islamistes déchaînent leur violence !
Et cela nous renvoie droit à une leçon que le socialisme n'aurait jamais dû oublier : celle du marxisme. Car la pensée de Marx lorsqu'il écrivait que « la religion est l'opium du peuple » n'était pas celle de l'interdiction de quelque religion que ce soit : pour lui, la religion était avant tout une superstructure née du mode de production, c'est l'organisation économique et sociale qui la détermine. L' « opium du peuple » n'est que ce qui masque l'oppression pour aider les opprimés à la supporter.
Cette pensée matérialiste, il la développe en particulier dans un livre qu'on n'a cessé depuis de déformer : La question juive. Dans cet ouvrage, il répond à son ancien professeur Bruno Bauer, lequel estimait l'émancipation des juifs impossible si ceux-ci ne renonçaient pas à leur religion, le judaïsme étant pour Bauer un blocage supplémentaire à la liberté par rapport au christianisme : on était alors dans l'Allemagne du XIXème siècle, où les Juifs vivaient séparés du reste de la société, avec des libertés spécifiques en matière de commerce et de finance mais un statut inférieur aux chrétiens, dans un État qui n'était pas laïque. La réponse de Marx est cinglante : elle l'amène d'une part à théoriser la laïcité, considérant qu'un véritable État ne peut être lié à une religion en particulier et que sa véritable tâche est justement de permettre l'émancipation politique sans que l'émancipation religieuse ne soit nécessaire, mais surtout, il reproche à son ancien professeur de ne chercher à voir dans l'émancipation des juifs qu'une question théologique, séparée de toute pratique, comme si le comportement des juifs s'expliquait par leurs textes religieux et non par leurs conditions de vie. D'où son appel : « Considérons le Juif réel, non pas le Juif du sabbat, comme Bauer le fait, mais le Juif de tous les jours. Ne cherchons pas le secret du Juif dans sa religion, mais cherchons le secret de la religion dans le Juif réel. ». Ce qui amène Marx à conclure que dans la société où ils vivent, qui les voue aux activités de finance et de commerce, les juifs ne peuvent pas abandonner leur religion, plus souple que le christianisme pour ces activités : ils en ont un besoin pratique. Et par conséquent, que si la société changeait, ne leur assignait plus ces activités, les juifs renonceraient à leurs croyances, devenues inutiles. C'est donc la société qu'il faut changer pour émanciper les juifs, il clôt alors son ouvrage sur la phrase : « L'émancipation sociale du Juif, c'est l'émancipation de la société du judaïsme. », c'est à dire que pour réellement émanciper les gens de la religion, il faut les émanciper de la société qui a produit cette religion.
Vouloir interdire une religion, ou simplement sa manifestation publique, est donc parfaitement inutile : on peut considérer une religion, qu'il s'agisse de l'islam, du christianisme, du judaïsme ou d'une autre, comme une aliénation, comme quelque chose de violent et ainsi de suite, mais le comportement des individus étant déterminé avant tout par leur société, y compris en ce qui concerne leur religion, c'est cette société qu'il faut changer.
On n'est pas obligé de partager l'athéisme et le matérialisme qui étaient ceux de Marx, mais toujours est-il qu'il met l'accent sur quelque chose de capital (sans mauvais jeu de mots) : la clé du comportement humain ne réside pas dans des textes religieux mais dans une société réelle, c'est avant tout cela qui détermine les actions et les idées des croyants comme des autres ; sinon, on peut se demander pourquoi on n'a plus vu un juif lapider quelqu'un depuis un bon moment... Ce n'est pas seulement parce que le message de ces religions est bien plus complexe que ne le croient les extrémistes de tout bord mais aussi, tout simplement, parce que les croyants n'utilisent pas la religion comme un logiciel mais avec une raison et dans un contexte social.
Voilà pourquoi le socialisme revendique la laïcité, voilà pourquoi la religion est une affaire privée qui peut s'exprimer publiquement : le pouvoir politique n'a pas à s'occuper de ce que les gens croient mais de ce qu'ils font, et ce qu'ils font n'est pas déterminé par un texte vieux de quinze siècles mais par une structure sociale.
La réponse aux conflits qui peuvent survenir avec des croyants aux revendications agressives, musulmans ou autres, comme aux intolérants est donc la même : la laïcité, toute la laïcité, rien que la laïcité.