Laibach posant en Corée du Nord en août 2015, à l'occasion de leur concert à Pyongyang, image postée sur le compte facebook du groupe : https://www.facebook.com/Laibach/?ref=ts&fref=ts
Bien qu'il soit resté totalement inconnu du grand public, le groupe slovène Laibach a réussi à se faire connaître bien au-delà des frontières de son petit pays natal pour devenir une véritable légende dans le milieu des musiques sombres ; cette renommée, il la doit à déjà trente-six ans d'expérimentations musicales dans la lignée de la musique industrielle mais aussi à son goût de la provocation, chargeant sa musique et son imagerie de références politiques et historiques dérangeantes, notamment tirées des régimes totalitaires, afin de mettre en lumière par la caricature le lien indissoluble entre l'art et la politique. Laibach a ainsi exercé une influence incontournable sur la musique industrielle et au-delà, il est notamment d'usage d'en faire l'un des principaux inspirateurs de Rammstein, à tort ou à raison, tant sa musique que sa démarche provocatrice ayant nourri les artistes qui lui ont succédé ! Pour ceux qui ne les connaissent pas, voici donc une présentation de ce groupe exceptionnel, dont la musique a beaucoup évolué au fil du temps sans rien perdre de sa force !
Il importe d'abord de se rappeler que Laibach est né dans un contexte bien particulier, celui de la Slovénie : le pays faisait alors toujours partie de la Yougoslavie, bien que se différenciant des autres populations yougoslaves par sa langue plus proche des langues germaniques et la prégnance du catholicisme en son sein, héritage d'un long rattachement à l'Autriche, il avait connu l'occupation de l'Allemagne nazie avant d'en être délivré par la résistance du Maréchal Tito, qui établit alors un régime socialiste mais dictatorial en rupture avec l'Union Soviétique ; c'est à la mort de Tito en 1980, alors que le régime yougoslave semblait prêt à se déliter, que Laibach fut fondé. Le groupe se nourrira ainsi longtemps des traumatismes connus par son pays : l'invasion de l'Autriche germanique et catholique sur ce qui était alors un pays slave et païen, l'invasion par le totalitarisme nazi, le régime de Tito se revendiquant du communisme, l'industrialisation avec ce qu'elle comporte d'aliénation, la lutte pour l'indépendance, l'ouverture au capitalisme avec les régressions qui s'en sont suivies... En 1984, Laibach déclara ainsi dans une interview n'être pas intéressé par les évènements politiques récents et être "apolitique" : et en effet, Laibach s'apparente alors avant tout à une mise en scène de l'histoire slovène ! Le nom "Laibach" n'est d'ailleurs autre que le nom germanique de la capitale de la Slovénie, Ljubljana.
Le groupe commence ainsi à travailler dans la première moitié des années 80 à quelque chose qui s'avère particulièrement dérangeant : comme d'autres groupes de la musique industrielle naissante, notamment Test Dept, ils recourent à une musique bruitiste évoquant la brutalité du monde industriel, parfois associée à des samples de musique classique ou contemporaine, accompagnée de paroles martelées et d'une imagerie d'inspiration totalitaire qui forment souvent un ensemble absurde... L'un des exemples les plus célèbres en est le morceau Die Liebe, hymne à la force de l'amour hurlé avec fanatisme en allemand sur une musique aussi sinistre que martiale ! Ce spectacle déstabilisant et ambigu politiquement n'est pas du goût du régime, et Laibach se voit déjà régulièrement censuré. Il faudra attendre 1985 pour que les enregistrements épars du groupe soient rassemblés sur deux albums, Laibach et Nova Akropola, la formation (qui n'est jamais claire sur ses effectifs, usant fréquemment de pseudonymes) a alors déjà changé de chanteur, le moustachu Milan Fras succédant à Thomaž Hostnik après le suicide de celui-ci. Il ne s'agit pas vraiment de la période la plus accessible de Laibach pour qui n'a pas l'habitude de la musique industrielle, qui était ici brutale et déjantée au possible !
Il importe d'abord de se rappeler que Laibach est né dans un contexte bien particulier, celui de la Slovénie : le pays faisait alors toujours partie de la Yougoslavie, bien que se différenciant des autres populations yougoslaves par sa langue plus proche des langues germaniques et la prégnance du catholicisme en son sein, héritage d'un long rattachement à l'Autriche, il avait connu l'occupation de l'Allemagne nazie avant d'en être délivré par la résistance du Maréchal Tito, qui établit alors un régime socialiste mais dictatorial en rupture avec l'Union Soviétique ; c'est à la mort de Tito en 1980, alors que le régime yougoslave semblait prêt à se déliter, que Laibach fut fondé. Le groupe se nourrira ainsi longtemps des traumatismes connus par son pays : l'invasion de l'Autriche germanique et catholique sur ce qui était alors un pays slave et païen, l'invasion par le totalitarisme nazi, le régime de Tito se revendiquant du communisme, l'industrialisation avec ce qu'elle comporte d'aliénation, la lutte pour l'indépendance, l'ouverture au capitalisme avec les régressions qui s'en sont suivies... En 1984, Laibach déclara ainsi dans une interview n'être pas intéressé par les évènements politiques récents et être "apolitique" : et en effet, Laibach s'apparente alors avant tout à une mise en scène de l'histoire slovène ! Le nom "Laibach" n'est d'ailleurs autre que le nom germanique de la capitale de la Slovénie, Ljubljana.
Le groupe commence ainsi à travailler dans la première moitié des années 80 à quelque chose qui s'avère particulièrement dérangeant : comme d'autres groupes de la musique industrielle naissante, notamment Test Dept, ils recourent à une musique bruitiste évoquant la brutalité du monde industriel, parfois associée à des samples de musique classique ou contemporaine, accompagnée de paroles martelées et d'une imagerie d'inspiration totalitaire qui forment souvent un ensemble absurde... L'un des exemples les plus célèbres en est le morceau Die Liebe, hymne à la force de l'amour hurlé avec fanatisme en allemand sur une musique aussi sinistre que martiale ! Ce spectacle déstabilisant et ambigu politiquement n'est pas du goût du régime, et Laibach se voit déjà régulièrement censuré. Il faudra attendre 1985 pour que les enregistrements épars du groupe soient rassemblés sur deux albums, Laibach et Nova Akropola, la formation (qui n'est jamais claire sur ses effectifs, usant fréquemment de pseudonymes) a alors déjà changé de chanteur, le moustachu Milan Fras succédant à Thomaž Hostnik après le suicide de celui-ci. Il ne s'agit pas vraiment de la période la plus accessible de Laibach pour qui n'a pas l'habitude de la musique industrielle, qui était ici brutale et déjantée au possible !
Le morceau Die Liebe joué en concert en 1986, la mise en scène poussant à son paroxysme la contradiction entre la musique et les paroles !
Panorama, morceau instrumental de la même époque.
C'est cependant l'album suivant qui est le plus connu de Laibach : Opus Dei, en 1987. La musique de Laibach se fait alors plus structurée et surtout plus martiale, à base de rythmes pesants et de slogans en guise de chants, mais le plus important n'est pas là : sous cette forme, le groupe slovène se met à reprendre des classiques de la pop et du rock ! On le voit ainsi transformer la niaise Life is Life d'Opus en une marche militaire agressive et grandiloquente, la One Vision de Queen subit le même sort et est en plus traduite en allemand sous le nom de Geburt Einer Nation ; pour faire bonne mesure, ces morceaux sont accompagnés de clips multipliant les allusions à une imagerie traditionnelle en total décalage avec le rock et la pop... Surprise : c'est non seulement extrêmement drôle et réussi musicalement, mais c'est en plus pertinent, car les paroles de Queen et Opus changent complètement de sens sous cette forme ! Laibach dépouille ainsi ces classiques commerciaux de leurs habits contestataires et montre à quel point la musique moderne peut être réinterprétée politiquement.
Le clip accompagnant la reprise de Life is Life, représentant le groupe en habits traditionnels slovènes chantant la chanson d'Opus au milieu d'une collection de symboles traditionnels, sérieux comme des papes...
Le clip Geburt Einer Nation, reprenant les paroles de One Vision de Queen traduites en allemand sur fond d'une imagerie totalitaire caricaturale.
Ces reprises parodiques permettent au groupe de se faire connaître, mais là encore, tout le monde ne goûte pas la plaisanterie : leurs insanités sont interdites en France à cette époque et taxées de propagande fasciste, tandis qu'elles seront interdites pour propagande communiste aux États-Unis ! De même, des gens se mettent à apprécier Laibach en croyant avoir affaire à un groupe qui défend une idéologie totalitaire ou une autre... Il est tout de même assez inquiétant de voir des gens capables de prendre au sérieux des clips aussi grotesques et reprenant des chansons telles que Life is Life ! Mais cela ne dérange pas Laibach, qui s'amuse d'avoir mystifié les uns et les autres, laissant libre cours à toutes les interprétations possibles et imaginables en interview. "Nous sommes aussi fascistes qu'Hitler était peintre !", déclarent-ils ! Ils diront bien plus tard de cette époque "Nous devons être justes avec nos censeurs : si nous ne nous étions pas si bien connus, nous nous serions nous-mêmes censurés !"...
Le groupe poursuit sur sa lancée avec deux albums qui reprennent cette ficelle de la transformation d'hymnes populaires en des morceaux martiaux et pesants : Sympathy for the Devil, constitué de huit reprises lorgnant sur l'électronique de la chanson du même nom des Rolling Stones (vous avez bien lu), et Let It Be, ensemble de reprises des Beatles composé sous drogue dure de l'aveu même du groupe... Ce dernier est au final moins intéressant musicalement, mais le massacre est jouissif à l'écoute !
Le groupe poursuit sur sa lancée avec deux albums qui reprennent cette ficelle de la transformation d'hymnes populaires en des morceaux martiaux et pesants : Sympathy for the Devil, constitué de huit reprises lorgnant sur l'électronique de la chanson du même nom des Rolling Stones (vous avez bien lu), et Let It Be, ensemble de reprises des Beatles composé sous drogue dure de l'aveu même du groupe... Ce dernier est au final moins intéressant musicalement, mais le massacre est jouissif à l'écoute !
Le clip de l'une des reprises de Sympathy for the Devil, superposant aux paroles des Rolling Stones sur l'influence du diable dans l'histoire une mise en scène grandiloquente de l'Europe passée dans laquelle le christianisme semble tenir une bien faible place... Le site nazi Les intransigeants y a vu une "diabolisation de l'homme blanc traditionnel" !
Le clip accompagnant la reprise de la chanson des Beatles Accross The Universe, qui fait ressortir la niaiserie des paroles au milieu d'une imagerie passéiste, donnant l'impression que c'est un hymne au conservatisme et à l'aveuglement ("Nothing's gonna change my world"...). Notez l'intervention grossière de Milan Fras à la fin du clip !
C'est en 1990 que la période la plus industrielle de Laibach se conclut : le groupe sort alors un album purement instrumental, Macbeth, chef d'œuvre où la musique industrielle se mêle à du classique d'inspiration wagnérienne pour une ambiance particulièrement sombre ! Il est malheureusement introuvable sur Youtube. Dans un style proche, à noter aussi la bande originale qu'ils ont composée pour la pièce de théâtre Krst Pod Triglavom, traitant de la conquête de la Slovénie par l'Autriche ; la pièce est quant à elle l'œuvre de Red Pilot, car autour de la musique de Laibach gravitent désormais d'autres artistes slovènes reprenant les thèmes du groupe, en théâtre ou en peinture, on nomme le collectif qu'ils forment le Neue Slowenische Kunst (nouvel art slovène), NSK.
Les années 90 voient Laibach évoluer vers une musique électronique beaucoup plu diverse que l'industriel bruitiste des débuts : elles commencent malheureusement assez mal avec l'album Kapital, hommage à l'album Electric Cafe de Kraftwerk sur le thème du capitalisme, qui s'avère au final certes original mais aussi ennuyeux et particulièrement kitsch... C'est plutôt un album à éviter pour découvrir Laibach. Qu'à cela ne tienne : Laibach rebondit l'année suivante avec l'album NATO (c'est à dire OTAN en anglais), constitué de reprises sur le thème de la guerre ; l'instrumental de cet album est une musique électronique dansante qui n'est pas forcément très recherchée, mais tout l'intérêt de l'album consiste en l'usage des chœurs qui rendent Laibach encore plus grandiloquent que d'habitude ! Depuis cette époque, les chœurs féminins ne quittent plus Laibach. On saluera en particulier sur cet album la reprise de Alle Gegen Alle, célèbre morceau du duo DAF, les pères de l'EBM, la branche dansante de la musique industrielle ; et cette fois, il n'est pas question de parodie, Laibach reprend simplement le morceau très sobre de DAF pour en faire une reprise dans son propre style.
Les années 90 voient Laibach évoluer vers une musique électronique beaucoup plu diverse que l'industriel bruitiste des débuts : elles commencent malheureusement assez mal avec l'album Kapital, hommage à l'album Electric Cafe de Kraftwerk sur le thème du capitalisme, qui s'avère au final certes original mais aussi ennuyeux et particulièrement kitsch... C'est plutôt un album à éviter pour découvrir Laibach. Qu'à cela ne tienne : Laibach rebondit l'année suivante avec l'album NATO (c'est à dire OTAN en anglais), constitué de reprises sur le thème de la guerre ; l'instrumental de cet album est une musique électronique dansante qui n'est pas forcément très recherchée, mais tout l'intérêt de l'album consiste en l'usage des chœurs qui rendent Laibach encore plus grandiloquent que d'habitude ! Depuis cette époque, les chœurs féminins ne quittent plus Laibach. On saluera en particulier sur cet album la reprise de Alle Gegen Alle, célèbre morceau du duo DAF, les pères de l'EBM, la branche dansante de la musique industrielle ; et cette fois, il n'est pas question de parodie, Laibach reprend simplement le morceau très sobre de DAF pour en faire une reprise dans son propre style.
Le clip de Alle Gegen Alle, qui pour une fois se contente de représenter le groupe en live.
À noter qu'à cette époque, jugeant sans doute n'en avoir pas encore fait assez dans la provocation mégalomane, Laibach proclame sous le nom de son collectif artistique NSK une sorte d'État virtuel dont peuvent devenir citoyens des gens de toutes origines, de toutes opinions et de toutes croyances à condition de considérer comme le groupe que l'art est politique et que la politique est artistique !
Cette période voit se développer vigoureusement les croisements entre musique industrielle et metal, initiés par le groupe américain Ministry, auquel emboîtent le pas KMFDM, The Young Gods, Oomph !... ou même Rammstein, fondé en 1995 ! Dans ce contexte, Laibach parvient en 1996 à frapper à nouveau très fort en revenant avec un album de metal industriel, Jesus Christ Superstars ; et aussi incroyable que cela puisse paraître, les Slovènes s'avèrent capables de maîtriser aussi bien les guitares que les claviers, leur usage des chœurs et leur talent pour faire de leurs chansons des hymnes apportant leur touche bien particulière au metal industriel ! L'album est malheureusement presque absent de Youtube, en revanche on le trouve sur Deezer : http://www.deezer.com/album/7160685?utm_source=deezer&utm_content=album-7160685&utm_term=4938565_1460913547&utm_medium=web
Cette période voit se développer vigoureusement les croisements entre musique industrielle et metal, initiés par le groupe américain Ministry, auquel emboîtent le pas KMFDM, The Young Gods, Oomph !... ou même Rammstein, fondé en 1995 ! Dans ce contexte, Laibach parvient en 1996 à frapper à nouveau très fort en revenant avec un album de metal industriel, Jesus Christ Superstars ; et aussi incroyable que cela puisse paraître, les Slovènes s'avèrent capables de maîtriser aussi bien les guitares que les claviers, leur usage des chœurs et leur talent pour faire de leurs chansons des hymnes apportant leur touche bien particulière au metal industriel ! L'album est malheureusement presque absent de Youtube, en revanche on le trouve sur Deezer : http://www.deezer.com/album/7160685?utm_source=deezer&utm_content=album-7160685&utm_term=4938565_1460913547&utm_medium=web
Le clip de la chanson God is God, reprise d'une chanson de Juno Reactor... sortie avant l'originale !
Après ce coup d'éclat, Laibach disparaît pour sept ans ; le groupe avait-il fait son temps comme tant d'autres groupes industriels des années 80 ? Il revient en 2003 prouver le contraire, et s'y montre même plus vivant que jamais ! C'est l'album WAT, sur le thème du temps et donc de l'histoire ("We Are Time", comme ils le disent eux-mêmes !), dont les compositions consistent cette fois en une EBM froide et implacable, qui évoque celle de DAF en plus complexe et torturée... Cet album à la fois sombre et bien rythmé est souvent considéré comme leur chef d'œuvre, ce qui n'est pas anodin pour un groupe qui a déjà vingt-trois ans de carrière derrière lui !
Le clip de la chanson Tanz Mit Laibach, dont les paroles aussi bien que la musique sont clairement un hommage à la Der Mussolini de DAF. Un classique imparable en live !
La chanson Now You Will Pay, qui évoque les rapports entre Europe de l'est et de l'ouest, morceau à la fois dansant et fantomatique.
Il est à noter qu'on voit à cette époque Laibach transgresser l'un de ses tabous en s'exprimant une position sur un évènement politique actuel : on les voit ainsi en interview accuser l'Union Européenne de ne pas avoir fait son devoir pour éviter les guerres en ex-Yougolavie par son refus de s'ouvrir à l'est. Ce changement paraît s'accroître avec l'album suivant, Volk, qui sort en 2006 avec un effectif considérablement renouvelé et féminisé. Il s'agit à nouveau d'un album de reprises... d'hymnes nationaux ! Laibach se permet en effet de reprendre les hymnes de plusieurs pays pour y apporter son éclairage, et si la musique est cette fois étonnamment douce, ce qu'elle met en valeur n'est pas toujours flatteur... Yisra'el, magnifique mais malheureusement indisponible sur youtube (elle est en revanche sur deezer) évoque ainsi le conflit israélo-palestinien : Laibach déclare à propos de cette chanson en interview considérer que Juifs et Palestiniens forment un même peuple séparé par la politique et la religion qu'il s'agirait de réunifier ; on n'est évidemment pas obligé d'approuver, mais quoi qu'il en soit, la position est aux antipodes du racialisme, ce qui la rend assez drôle quand on pense aux accusations de fascisme dont le groupe fait l'objet...
Francia en live en 2014, reprise de la Marseillaise qui met en opposition dans ses paroles l'idéal républicain de la France, sa révolte en quête de liberté, et dans le même temps ceux qui en sont exclus. Le groupe dira s'être inspiré de l'embrasement des banlieues l'année précédente.
Rossiya, reprise de l'hymne russe.
Il s'ensuit à nouveau une longue période pendant laquelle les fans du groupe n'ont plus rien à se mettre sous la dent, hormis le disque Laibachkunstderfuge, étrange réinterprétation électronique de L'art de la fugue de Bach qui paraît en 2009 (oui bah écoutez, ils n'en étaient plus à ça près, hein), ainsi que la bande originale du film de SF parodique Iron Sky. Mais le vrai grand retour de Laibach se fait en 2014, trente-quatre ans après la création du groupe, avec l'album Spectre, et à nouveau, Laibach prend tout le monde de court : la musique du groupe puise cette fois abondamment... dans la pop, qu'ils combinent à l'EBM et à leur usage habituel des chœurs pour en tirer une musique faussement douce, faite d'hymnes à la fois entraînants et inquiétants ! Cela vaut au groupe le scepticisme d'une grande partie des fans (d'autant que les morceaux initialement présentés n'étaient pas vraiment les meilleurs de l'album...), mais au final, l'album s'avère extrêmement original et très prenant à l'écoute. L'autre surprise, c'est que Laibach n'hésite plus à évoquer des thèmes très actuels : en interview, le groupe dénonce à présent une Union Européenne au service de la finance, qui ne fait plus que brider les droits des peuples plutôt que de défendre la paix et le progrès. On devine sans peine dans les thèmes de l'album l'inspiration des mouvements citoyens contre le pouvoir des banques et les politiques d'austérité tels que les Indignés ou Occupy Wall Street. À noter également la montée en puissance de la chanteuse Mina Špiler au sein du groupe, déjà présente sur Volk, qu'on entend bien plus sur cet album et qui paraît dorénavant faire office de frontwoman sur scène !
Eat Liver ! en live en 2014, l'un des morceaux les plus dansants de l'album.
Le clip de la chanson Eurovision, traitant avec pessimisme du destin de l'Europe.
Parvenu l'année dernière à l'âge vénérable de trente-cinq ans mais avec un effectif considérablement rajeuni, Laibach se livre alors à un nouveau coup d'éclat, couronnement de trente-cinq années de provocations : le groupe parvient à se faire accepter pour une tournée... en Corée du Nord ! Le coup médiatique est réussi, même la presse la plus mainstream relayant ébahie l'évènement, et la boucle est ainsi bouclée, Laibach parodie le totalitarisme dans un pays soumis à un régime tout aussi caricaturalement totalitaire, devant un public qui peut très bien le prendre au premier degré... Et tant pis pour les esprits chagrins qui y voient une façon de cautionner ledit régime ! Après tout, comme Laibach le dit lui-même en interview, "Nous n'allons pas en Corée du Nord pour provoquer les Coréens mais pour provoquer le reste du monde"...
On en est ainsi à trente-six ans d'évolution musicale et de provocations en tout genre de Laibach, avec une œuvre tout à la fois géniale, riche, drôle et dérangeante ; le groupe ne laisse semble-t-il personne indifférent, dénoncé et même censuré par les uns, encensé par les autres... Ce qui est sûr, c'est que Laibach n'est pas un groupe ordinaire !
On en est ainsi à trente-six ans d'évolution musicale et de provocations en tout genre de Laibach, avec une œuvre tout à la fois géniale, riche, drôle et dérangeante ; le groupe ne laisse semble-t-il personne indifférent, dénoncé et même censuré par les uns, encensé par les autres... Ce qui est sûr, c'est que Laibach n'est pas un groupe ordinaire !